Dès 1911, l'influence de F.L. Wright, disciple de Louis Sullivan, maître de
l'Ecole de Chicago, avait
franchi l'Atlantique ... Comme les architectes rationalistes
européens, F.L. Wright
est un pionnier de l'architecture moderne, mais sur
un autre mode, plus discret... Le premier aux Etats-Unis, il
a arraché complètement l'architecture aux
pastiches du passé et à l'éclectisme,
au profit d'un style typiquement américain. Son
affranchissement de la tradition prend en effet une forme
originale : la meilleure illustration en est sa conception
du plan libre, liée
à un concept d'espace
organique interne qui
inspire toute son oeuvre, laquelle excelle dans la maison
particulière. Cette organicité de l'espace intérieur se
caractérise par l'importance des murs et des surfaces
pleines, le rôle des matériaux bruts naturels, le
refus de toute typologie au profit d'une grande
diversité, enfin l'enracinement
dans le paysage - et ce dernier point éclaire
son adhésion au concept de la cité-jardin qui
vient de naître en Angleterre, sous la férule
du britannique Ebenezer
Howard.
A cette architecture correspond - logiquement
- une théorie de l'établissement humain qui
est une sorte d'anti-urbanisme et plonge ses racines dans la
tradition de pensée américaine
inaugurée par Jefferson et Emerson : c'est l'utopie de Broadacre, que Wright
développe en trois livres successifs (*) et illustre en 1934 par une maquette
géante.
(*) The Disappearing City, New-York, 1932
/ When Democracy Builds,
Chicago University Press, 1945. / The
Living City, Horizon Press, New-York, 1958.
Le souci constant, chez
la plupart des architectes, de tenir compte des
réalités économiques et culturelles de
leur pays peut s'accompagner, dans la conception et la
réalisation de leur oeuvre, d'une attention
particulière au contexte géographique,
à l'environnement topographique, aux liens avec le
sol, en somme au respect de
la nature. Ce souci est
présent, dès les années 30, chez l'
américain F.L.
WRIGHT. Celui-ci, en
réaction aux excès de l'urbanisation
industrielle occidentale, pense que seul le contact avec la
nature peut rendre l'homme à lui-même et
permettre un harmonieux développement de la personne
comme totalité. Ce rapport originel et fondamental
avec la terre n'est possible que dans une forme d'habitat
qui élimine non seulement la mégalopolis mais l'idée même de
ville en général... Dans ce nouveau
type d'urbanisme, quasiment rural, la
nature occupe l'essentiel du terrain, sur lequel toutes les
fonctions urbaines sont dispersées et isolées sous forme d'unités
réduites.
L'espace "urbain" ainsi
conçu s'adapte d'autant mieux à la
diversité topographique : la nature, selon WRIGHT, doit
être respectée dans tous ses accidents. Ainsi,
l'architecture cesse d'être un système de
formes indépendantes immergées dans un espace
abstrait, "mais
résulte authentiquement de la topographie... Sous une
infinie variété de formes, les édifices
expriment la nature et les caractères du sol sur
lequel ils s'élèvent ; ils en deviennent une
partie intégrante."
En somme, l'architecture est subordonnée à la
nature, à quoi elle
doit constituer une sorte d'introduction... Par ce
rêve d'urbanisme naturaliste, F.L.
WRIGHT rejoint P. KROTOPKINE qui, dans le même esprit, accordait
lui-même une grande importance au lien naturel avec le
sol...
On peut ajouter que le
modèle urbain
naturaliste de Wright propose
un logement
individuel, dans le cadre
de maisons particulières, dotées de quelques acres de terrain
dévolues à l'agriculture
comme aux loisirs...
Surtout, une vie libre et harmonieuse a besoin d'
intimité : celle-ci est tributaire de l'architecture
des édifices particuliers, dont l'organisation
spatiale, chez F.L.
Wright, est marquée par
ce même souci de "clôture" et d' "intimité"...
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