Album de famille 1 . Album de famille 2 .. La mémoire partagée . Galerie de portraits .. 14 - 18 . 39 - 45 ... Huguette . Irène . Lucie . Odile . Madame St. . Madame S. . Mme H.

Souvenirs d'une Alsace reconnaissante ... Les aquarelles de Ferdinand ... Les greniers de la mémoire ... Galerie photos "LECLERC" ... Le métier de BIOGRAPHE

" Souvenirs, souvenirs ... "

Nous nous sommes rendues à la maison de retraite Saint Arbogast pour une "cueillette" de souvenirs... Nous remercions vivement Madame H. de sa gentillesse et de toute l'aide qu'elle nous a apportée à cette occasion.

E&L : Parlez nous un peu de votre enfance...

C.H : J'ai été élevée dans la campagne alsacienne avec mon frère aîné. Mon père, droguiste, fut mobilisé pendant la guerre de 14-18. Ma mère, quant à elle, est décédée dans mes jeunes années... je devais avoir environ 3 ans. Je garde de cette époque le souvenir des "gens de la ville" qui venaient s'approvisionner à la ferme en oeufs, beurre et autres denrées qu'il était difficile d'obtenir en centre ville. Ils cousaient généralement dans leurs manteaux de grandes poches pour pouvoir y cacher leurs victuailles : beaucoup avaient peur que les Allemands ne les leur confisquent. De toute façon, c'était peine perdue, car toutes les personnes étaient fouillées à l'arrivée du train en gare. ( Sourire ) Le marché noir était très surveillé. Et puis, après l'armistice, nous sommes retournés vivre à Strasbourg.
E&L : Quel est votre plus mauvais souvenir de ce temps ?

CH : Eh bien ... Je devais baratter le beurre avec mon frère : il s'agissait de secouer un pot de lait fermé de plus en plus en fort pour pouvoir récupérer les petits morceaux jaune doré, remontés à la surface. Hélas, nous finissions surtout avec des crampes douloureuses aux bras...

E&L : Et le plus beau ?

C.H : J'imagine toutes les fêtes, particulièrement celle de Noël , qui m'a marquée avec son sapin. Je recevais alors en cadeau des tabliers neufs, des robes, toujours quelque chose d'utile. Mais le plus beau présent qu'on m'ait offert, tout du moins celui qui m'a le plus étonné, ce fut un fruit considéré comme exotique à cette date : une mandarine... Je lui trouvais une saveur amère dont il me reste même aujourd'hui le goût en bouche.

E&L : Qu'aviez- vous pour jouer ?

C .H : Oh, je ne possédais pas vraiment beaucoup de jouets : je me rappelle notamment une poupée au corps de porcelaine. Le seul problème, c'est qu'elle était très fragile, il ne fallait surtout pas la briser !

E&L : A propos de l'école, où s'est déroulée votre scolarité ?

C.H : J'ai commencé l'école à 6 ans, à l'École des Dragons à Strasbourg, ce qui correspondrait aujourd'hui au cycle primaire. J'ai poursuivi avec deux années de collège, puis ma famille n'a plus jugé nécessaire que je poursuive mon instruction. Du coup, j'ai perdu de vue mes anciennes camarades de classe.

E&L: Quelles langues y avez-vous apprises ?

C.H : A la maison, nous parlions tous le dialecte alsacien... Ce n'est qu'au cours de mes études que j'ai appris le français. Je ris encore de ma première "leçon": nous étions assis dans la mairie et un capitaine français avait pour charge de nous l'enseigner. Il nous faisait répéter successivement : "la v-a-c-h-e, la vache", "le b-o-e-u-f, le boeuf", "f-e-r-m-e la p-o-r-t-e, ferme la porte "...

E&L : Durant votre adolescence, aviez-vous le droit de sortir, vous amuser le soir ?

CH : Certes non... Une fois, mon frère a voulu m'emmener danser en ville. Ravie, je me suis préparée pour partir. Mais lorsque mon père m'a vue, il s'est fâché et m'a ordonné de remonter immédiatement dans ma chambre pour me déshabiller. Pour lui, il était hors de question que je sorte !

E&L: Qu'avez-vous fait, une fois vos études achevées ?

C.H : On m'a d'abord employée comme aide dans le commerce familial, après quoi je me suis mariée : j'avais seulement 21 ans et demie. Mon jeune mari a débuté en tant que délégué médical, puis lui-même a ouvert sa propre droguerie. La vie a continué et nous avons eu deux filles, quand en 1939 la deuxième guerre mondiale a éclaté, et mon époux a été mobilisé sur le front.


Publicité 1947

Photo Pléiade / Marché aux Puces de Strasbourg

E&L: Etes-vous partie ?

CH: Oui, comme beaucoup de Français, j'ai fui la zone occupée avec mes enfants en direction de Marseille. C'était en 1942. Nous habitions au premier étage d'une maison à côté de la centrale électrique. Nous vivions sous les bombardements de la ville, mais le problème du ravitaillement était aussi très difficile à supporter : nous avions droit à un kilo de pommes de terre par mois, tous les quinze jours, à quatre-vingt dix grammes de viande, et à un quart de lait pour ma deuxième fille qui n'était qu'un nourrisson. Cependant, pour la nourrir correctement, j'ai dû l'allaiter jusqu'à quatorze mois.

Ensuite nous sommes parties à Hautefort, en Dordogne. Nous y avons vécu parfois de drôles de situations... Je me souviens, à ce sujet, d'une anecdote particulièrement poignante. Un jour, je suis tombée malade. J'ai demandé à mon aînée d'aller chercher un médecin. Pendant ce temps, des maquisards se sont installés au village. Seulement les Allemands avaient été prévenus par je ne sais qui et ils ont encerclé le hameau, à la recherche des contestataires. Heureusement, les autres avaient eu le temps de fuir. Mais moi, je me suis retrouvée avec, devant ma porte, des soldats prêts à tirer. C'est à cet instant que ma fille est revenue... Coincée entre un mur et des hommes armés, ça a été une de mes plus grandes frayeurs !

E&L : Et vous n'aviez plus de nouvelles de votre mari ?

CH : Presque plus, car il était tellement difficile d'envoyer des lettres. Elles passaient souvent par la zone libre, sinon via la Suisse. Il était impossible de savoir ce qu'elles devenaient, et il n'était pas rare d'en recevoir avec de longs mois de retard.

E&L : Que s'est-il passé, une fois l'armistice signée ?

CH : Après être rentrés en Alsace, nous avons petit à petit reconstruit notre vie. Il fallait tout recommencer sur de nouvelles bases. Nous avons pris un commerce et nous travaillions très dur, tous les jours, excepté le dimanche.

E&L : Que faisiez vous pour vous divertir ?

CH : L'important était de réussir pour donner un meilleur avenir aux enfants. Alors, notre seul moment de détente dans la semaine, c'était la promenade du dimanche, en famille. Certaines soirées, mon mari et moi allions au théâtre alsacien ou au cinéma. Lors des périodes de congés, (qui n'étaient pas nombreuses), nous partions en vacances dans les Vosges, en voiture. D'ailleurs, notre première automobile fut une Citroën, achetée en 1952. Quant à la télévision, nous avons attendu 1965, c'est à dire la fin des études de nos enfants, pour en faire l'acquisition.

E&L : Enfin, y a-t-il une invention qui vous ait particulièrement marquée ?

CH : Celle d'un nouveau médicament : l'aspirine...

Souvenirs recueillis par E. et L.

Album de famille 1

Odile

Lucie

Galerie de portraits

Madame St.

Album de famille 2

Mme H.

Irène

14 - 18

...Les greniers de la mémoire

La mémoire partagée

Madame S.

Huguette

39 - 45

Galerie photos "LECLERC" 

Les aquarelles de Ferdinand

Souvenirs d'une Alsace reconnaissante

Le métier de BIOGRAPHE

Accueil

 courriel clady@noos.fr