LA
PEINTURE
Les Egyptiens
n'ont pas connu la peinture au sens où nous
l'entendons. Elle n'est chez eux qu'un dessin
enluminé. On se contenta pendant des siècles
de teintes plates et peu variées. Ce
procédé enfantin est séduisant pour
deux raisons : d'une part les couleurs employées, si
l'on en juge par quelques exemplaires retrouvés,
étaient fraîches et vraies ; d'autre part, la
valeur du dessin confère aux oeuvres
égyptiennes un charme persistant.
Dans la
peinture égyptienne, le dessin est tout. L'Egyptien
est un dessinateur-né. L'adresse de main que nous lui
connaissons depuis les temps préhistoriques a
toujours été perfectionnée par le
besoin de faire vrai. La religion le veut ainsi. Il a
créé une graphie d'une qualité rare que
seuls les Grecs ont - de peu - dépassée. Or,
son dessin a gardé pendant plus de trois mille ans
les conventions avec lesquelles il était apparu au
seuil de l'Histoire. Quelle explication en donner, sinon
qu'il s'agit d'un parti pris ? Le dessinateur a gardé
la formule d'un oeil de face dans une figure de profil,
parce que son but n'est pas de rendre la nature telle que
nous la voyons, mais de la décomposer en ses
éléments essentiels. Ne pouvant tout exprimer,
il choisit. C'est ce qui lui a fait représenter avec
tant de bonheur les caractères distinctifs des
animaux. Il fuit d'instinct le raccourci. On trouve
çà et là des corps correctement
dessinés, et même la figure humaine
représentée de face. Est-ce là un
dessin malhabile ? Tout au contraire, il a un charme
expressif et pittoresque qu'on ne peut nier. Or, nous sommes
au milieu du second millénaire avant notre
ère. L'artiste égyptien qui, sans essais
préliminaires apparents, était capable de nous
donner ces curieuses représentations, avait le temps
de faire les progrès nécessaires. Mais il
n'éprouvait pas le besoin de changer, et la figure de
face est restée une rareté.
"L'Encyclopédie par l'image
: L'EGYPTE",
Librairie Hachette, Paris 1930
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