Les amours
de deux Sauvages dans le
désert
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Etude de
l'image / Analyse des jaquettes des ouvrages
utilisés en séquence 2 de Français. De la
dénotation aux connotations...
Textes
rédigés par les élèves
de la
Seconde
Canada 2003-04
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Introduction / Dès sa jeunesse, F.R. de Chateaubriand eut l'idée de décrire les
moeurs des "sauvages", en les encadrant dans une trame
historique. Le massacre de la tribu rebelle des Natchez, commis
par les Français en Louisiane en
1727, lui sembla un bon sujet. Et au retour de son fameux
voyage en Amérique, il devait réaliser son
rêve de jeunesse dans ATALA,
simple épisode de son livre sur les Natchez, de
même que René. De ces deux récits, ajoutés
comme exemples au Génie du
Christianisme,
Atala fut publié à part avant le
reste de l'ouvrage. Cette "anecdote",
écrite "dans les
déserts et sous les huttes des
sauvages", n'entend pas
seulement affirmer la théorie de la beauté du
christianisme, surtout dans la partie relative à la
poésie de la religion, mais elle révèle
un grand amour de la nature et une richesse sentimentale qui
devaient rendre l'écrivain célèbre
parmi les romantiques. L'oeuvre méritait bien le
succès qu'elle a eu dans la littérature
romantique à laquelle Chateaubriand donna une
impulsion décisive.... ( D'après Laffont-Bompiani,
Dictionnaire des oeuvres 1, p. 286-287, coll. Bouquins,
Robert Laffont. )
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Classiques Pocket
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Folio classique
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..... Classiques de Poche .....
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GF Flammarion
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Funérailles. Cette image met en scène trois
personnages, deux d'entre eux se lamentant sur le
troisième qui semble inanimé, mort.
L'"ambiance" est contrastée : autant les deux
premiers personnages paraissent sombres, tristes et
plongés dans l'ombre, autant le troisième,
placé au centre, baigne dans une lumière
intense, blanche et vivifiante, malgré le
côté morbide de la situation.
Anne Louis
Girodet - Trioson
"Les
Funérailles d'Atala" (1808),
Paris,
Musée du Louvre
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On
reconnaît ATALA
dans la jeune fille morte, que portent avec
émotion et recueillement l'Indien
Chactas, à gauche, et le
Père missionnaire Aubry,
à droite. Cette scène
représente en effet l'épisode de la
mort d'ATALA
et de sa mise en terre. On aperçoit dans
l'ombre un objet fatal, la pelle, instrument
nécessaire à l'inhumation. Cependant,
comme pour faire contrepoids, une croix, au flanc
d'Atala, apparaît resplendissante
dans la lumière ardente. Le fond neutre
concentre l'attention du lecteur sur cette
scène lugubre...
Cette image
représente un tournant dans l'intrigue,
l'épisode central du livre qui rompt avec
l'atmosphère idyllique du début. Jusqu'à la
fatalité inéluctable de cette
scène, le lecteur s'attend à un
dénouement heureux, mais la tristesse de
cette tragédie constitue
l'élément original du roman.
Néanmoins, la "double ambiance", mi-sombre, mi-lumineuse, de cette
image nous permet de nuancer notre analyse : tandis
que la trépassée semble
comblée, heureuse dans sa mort - elle
esquisse un sourire , les autres personnages
pleurent abondamment son trépas et en sont
sincèrement affligés ; celle qui
aurait le plus de raisons de déplorer sa
fin, au contraire, semble plongée dans un
état d'extase mystique. PARADOXE. Cette ambiguité intrigue
le lecteur, le fascine peut-être. La
scène en devient mystérieuse,
mystique, divine, car une présence divine
est perceptible au sein de cette lumière
incongrue et revivifiante ; on ne peut que deviner
une raison divine à ce sourire
angélique : Atala n'aurait-elle pas
trouvé le bonheur parfait en
récompense de sa vertu ? Quant au lecteur,
il se console de la séparation fatale et
tragique des deux amants, Atala
et Chactas, en se disant qu'ils poursuivront
leur amour dans l'éternité de
l'au-delà, dans le paradis
chrétien...
Voilà
l'image que l'éditeur veut donner du roman -
une histoire d'amour tragique et chrétienne
- et non les aventures d'un Indien dans les
paysages grandioses d'Amérique ; c'est son
choix.
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L'édition Folio classique nous offre un gros plan sur
Chactas. Il a les traits tendus sous
l'effet de la tristesse. Les couleurs dominantes
sont le brun et le blanc. Vêtu d'un drap
rouge noué autour de la taille, les cheveux
nattés et une boucle à l'oreille
droite, Chactas pleure la mort de sa
bien-aimée dont il serre fermement les
jambes. Cependant, il semble avoir le dos beaucoup
plus illuminé que sur la couverture
de l'édition
Pocket, qui reproduit
l'ensemble du même tableau... On
perçoit ici la technique du clair-obscur :
les jambes de la morte sont déjà un
peu dans l'ombre et Chactas tourne le dos à la
lumière, symbole de vie et de
renaissance.
Le pagne rouge
de Chactas représente l'amour, la
passion, le sang. Le fond vert, en haut à
gauche, représente la nature, la
forêt, la vie, l'espérance :
Chactas ne peut s'empêcher
d'espérer le retour de sa bien-aimée,
qu'il semble en tout cas vouloir retenir... Son
corps voûté semble supporter un poids
très lourd, sûrement le chagrin
provoqué par la mort d'Atala.
On a
pitié de Chactas, car il nous semble tellement
malheureux, écrasé par la douleur,
impuissant. Il nous fait penser au Roméo de Shakespeare, devant le corps de Juliette - autre amour contrarié,
noyé dans la mort des deux amants...
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Anne Louis
Girodet-Trioson,
"Les
Funérailles d'Atala" (détail)
Musée Girodet,
Montargis
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Luis Monroy,
La mort
d'Atala,
Musée
national d'art, Mexico
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Les
thèmes de cette représentation sont
la mort, dans une ambiance religieuse, et la
tristesse qui en découle. Cette illustration
fait référence au chapitre
intitulé "Le
drame", alors que
les jaquettes des trois autres livres illustrent la
dernière partie du roman : "Les
funérailles" ...
Atala, enveloppée d'un drap blanc
- symbole de pureté et de virginité -
est allongée sur un mélange de paille
et de terre, mourante, les yeux fixant l'hostie
offerte par le Père Aubry et sa main gauche pressant un
crucifix noir sur son coeur. On remarque également dans
sa chevelure la fleur blanche déposée
par Chactas. Celui-ci, torse nu et vêtu d'un tissu
rayé, est agenouillé aux
côtés d'Atala,
brandissant avec désolation un chapelet avec
une croix. Le Père Aubry, vêtu d'une aube,
présente à Atala
une hostie "luminescente" qui éclaire le
visage de la mourante. La lueur
dégagée par cette hostie nous fait
penser à la lumière divine appelant
l'âme d'Atala
dans son royaume
éternel. La blancheur immaculée de
son linceul confirme cette impression. Cette
lumière émise par Atala
éclaire les corps de Chactas et du Père Aubry.
Le passage
correspondant du roman est l'ultime étape de
l'agonie d'Atala... Tout autour, l'ambiance
générale est
ténébreuse, pour mettre en relief la
position centrale d'Atala,
au plus fort d'une luminosité quasi
céleste...
Cette
scène aux résonances mystiques,
détachée de toute
réalité terrestre, montre
effectivement que le monde extérieur ne
représente plus rien pour les trois
personnages représentés... Elle
révèle aussi le désespoir de
Chactas et sa conversion à la
religion catholique, conversion
entraînée par l'amour et la mort
d'Atala. Le chapelet qu'il brandit devant
le corps bientôt sans vie de la jeune fille
est un signe révélateur...
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Tout comme sur
les jaquettes précédentes, la
couverture proposée par Flammarion nous représente une
nouvelle fois le thème de la mort et de la
tristesse, à travers un gros plan
d'Atala, soutenue par le Père Aubry. On peut ainsi mieux
détailler l'attitude sereine d'Atala,
serrant une croix entre ses mains et
enveloppée d'un drap blanc. Quant au
Père
Aubry, on ne distingue
de lui que son visage attristé,
affligé par le sort d'Atala.
Il s'agit encore une fois d'une
représentation des funérailles
d'Atala, qui s'est donné la mort,
de peur de rompre ses voeux de
chasteté.
Les couleurs,
réparties en couches de forme plus ou moins
rectangulaire, donnent à cette couverture un
aspect original et moderne. Les quatre couleurs qui
dominent évoquent non seulement des lieux ou
des sentiments, mais aussi des scènes de
cette histoire : le VERT
symbolise la nature, si importante pour les
Indiens. Il nous rappelle surtout la
forêt dans laquelle ont longtemps
marché Atala
et Chactas. Le BLEU
symbolise l'eau et le ciel, la rivière
qu'ont traversée Atala
et Chactas et la pluie qui tombait
lorsqu'Atala
a failli briser son voeu de chasteté. Le
BLANC nous rappelle la pureté si bien
associée à Atala,
qui, nous dit-on, au moment de sa mort, semble
être une véritable sainte. Le
GRIS représente la tristesse et
le deuil. Il nous rappelle instantanément la
mort d'Atala,
donc la peine de Chactas et du Père Aubry.
Cette
couverture, qui réunit une perspective moderne et une vision ancienne, incite à la lecture, de
par le mystère de ce curieux mélange
d'époques et de couleurs...
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Illustr.
Anne-Marie Adda
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Nouvelles
jaquettes (cliquez) pour ATALA
dessinées par des
élèves de la Seconde Columbus 2004-05
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