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La
fête chez nous, au Liban
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La fête est un moment
privilégié dans la vie du peuple
libanais ; elle se rattache à son histoire et
à sa géographie, à ses traditions comme
à sa culture. Dans nos villages, où la grande
famille est composée de plusieurs
générations vivant souvent sous le même
toit, la fête a une saveur qui lui est propre. Elle ne
se vit qu'avec la participation de tous les habitants du
village et ne s'accomplit qu'avec le partage d'un repas ou
d'un plat préparé spécialement pour
l'occasion... Elle ne s'achève qu'avec la danse
traditionnelle, le Dabké.
La
naissance d'un garçon fait la joie non seulement de
la famille mais de tout le village. La maman est
soulagée et peut dorénavant se laisser servir.
La grand-mère paternelle est fière de son fils
qui fait des garçons et la grand-mère
maternelle, avec les tantes, préparent
le "Meghli"*
pour le présenter aux voisins, aux amis et aux
parents qui viennent dire leur joie , offrir les cadeaux et
exprimer leurs voeux et leurs félicitations avec ces
termes : "Mabrouk" (Félicitations),
« Que Allah lui donne une belle vie »,
« Qu'Il le fasse grandir ». Les
visiteuses s'ingénient à deviner les traits de
ressemblance du nouveau-né ; de son
côté la grand-mère paternelle conclut
toujours qu'il ressemble uniquement à son papa ou
à un de ses oncles ! Dans cette ambiance de
fête, la réception se prolonge tant que la file
des amis n'est pas encore terminée et ainsi la
fête s'étale sur plusieurs jours, parfois des
semaines !
* Le
Meghli est un genre de dessert à
base de riz moulu auquel on ajoute une dose de sucre et
aromatisé de canelle ; on le fait bouillir sur
le feu durant 20 minutes ; on le sert froid dans des
bols après avoir garni la surface de noix de coco en
poudre, des noix sèches, des grains de raisin sec et
des pistaches.
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Ramadan
est un mois béni chez les musulmans, c'est
un temps de jeûne mais aussi de
festivités. Tout au long de la
journée, les fidèles s'abstiennent de
la nourriture pour festoyer le soir en famille. Le
repas quotidien est préparé par la
mère avec attendrissement. En attendant que
le canon tonne pour annoncer l'heure du repas, les
enfants étudient, les grands lisent le
Coran et
font leurs prières. A 18h.15, on a bien
faim : selon le rituel, on commence à
manger les dattes, puis la soupe et le
Fatouch
( sorte de salade aux légumes crus auxquels
on ajoute du pain grillé ) ; ensuite on
mange le plat du jour qui peut varier entre le
Kebbé ( viande hachée avec du
blé concassé et assaisonné de
menthe, de poivre et d'oignon ) cru et cuit, du
poisson, de la viande au riz...
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A noter que, durant ce mois, on
goûte aux meilleurs plats de l'année ; et
la pâtisserie est confectionnée d'une
manière très spéciale. Tout repas est
ouvert par une prière de remerciement à Dieu
pour sa générosité .
Bien que chaque rencontre
autour de la table soit une fête, les jours officiels
de la fête sont les trois derniers. Pas de travail,
pas d'école mais prières, repos, visites,
sorties, balades, rencontres, nouveaux habits, cadeaux...
etc... Les parents visitent les défunts et
distribuent du pain, de la viande, de la nourriture aux
pauvres... C'est un temps exceptionnel de
piété, de pénitence et de
miséricorde.
Saint Elie
est le
patron de grand nombre de paroisses libanaises.; on
le fête le 20 juillet. A Mejdlaya, et pendant une dizaine
de jours, la messe est
célébrée très tôt
le matin pour que tous les employés puissent
y assister avant de se rendre au travail. La
chapelle de Saint Elie se situe hors du village et pour y
arriver on marche en plein champ dans la
fraîcheur du matin; les mamans tiennent d'une
main leurs enfants et de l'autre le chapelet
qu'elles récitent seules ou avec le groupe ;
beaucoup de jeunes se donnent rendez-vous pour
être ensemble et se raconter leurs aventures
et leurs petits secrets ; après la
messe, et sur le chemin du retour, le silence
cède sa place aux bavardages, aux cris , aux
courses...
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La
veille de la fête, la messe solennelle est
suivie d'une procession de chants et de
prières. Les bougies allumées
couronnent les toits des maisons ou se fondent
devant la statue de saint Elie. Des bouquets de fleurs
ramassées dans les jardins des maisons sont
aussi déposés devant l'icône.
Au dîner, les familles se partagent les plats
qu'elles avaient préparés à la
maison.
L'arak (boisson alcoolisée
à base de raisin) est le maître de la
table. Les vendeurs de sucreries, de jouets, de...
profitent de l'occasion et viennent exposer leurs
marchandises de manière à
séduire les enfants. Les belles chansons de
Feyrouz fusent dans les airs et invitent
à la danse ; grands et petits
participent à la danse du Dabké : il suffit
d'apprendre les quelques pas rythmés et
infiniment répétés pour que
tout aille bien ! Souvent on ne rentre chez
soi qu'avec le lever du jour après avoir eu
sa part du Hrissé*.
(*
Dans de grands
chaudrons on fait bouillir toute la nuit et
à petit feu du blé et de la viande de
mouton ou de chèvre ; le jour de la
fête, tout le monde en
mange).
C'est des jours
inoubliables !
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Le 25 mai de l'an
2002, j'ai fêté
une occasion si chère et inoubliable :
ma
première communion. Pendant des mois, j'ai participé
au cours de catéchèse avec les
enfants du village. Nous apprenions des chants et
des prières, nous méditions avec le
curé autour des textes d'Evangile. Imaginez, je n'osais pas me confesser
car j'avais honte de dire mes
péchés ; mais petit à
petit j'ai réussi à le faire et
maintenant je n'ai plus de
problème.
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Le jour de la
cérémonie, toute la famille travaillait :
les uns décoraient le salon et l'entrée de
roses et de lys , les autres dressaient la table en la
couvrant d'une nappe blanche festonnée. On y avait
mis toutes sortes de gâteaux, de tartes, de jus de
fruits et de chocolat.
Vers midi , à la
cérémonie j'ai porté comme tous les
enfants une longue robe blanche, j'étais
coiffée d'une couronne de petites roses ;
Pendant la messe, j'étais tellement émue et
j'avais peur de faire ma prière à haute
voix . Assise à droite de l'autel, je regardais
incessamment mes parents qui m'avaient accompagnée
pour recevoir l'hostie. A la fin de la messe le curé
nous a distribué un Evangile et un
chapelet. Et les félicitations nous sont venues de
partout.
A la maison, j'ai reçu
de chouettes cadeaux. Avec les amis et les copains on s'est
régalé à goûter à toutes
les friandises et on s'est amusé pendant de longues
heures. Ce jour-là est inscrit dans mon coeur et mon
esprit. J'avoue que depuis je suis devenue plus
responsable !
L. M.
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Dans nos villages libanais, le
mariage est l'espoir des parents
dès la naissance de leurs enfants ; le
plus grand coup est de se marier en secret ;
tout le monde entoure la famille et participe
à la préparation .
La
veille de la cérémonie, les jeunes
hommes encore célibataires se
réunissent et festoient avec le futur
marié ; ils dînent , chantent,
dansent et s'enivrent.
Quant à la mariée, il
lui est interdit de rencontrer son
prétendant pendant quelques jours avant le
mariage ; surtout , elle ne doit pas lui
montrer sa robe blanche pour l'émerveiller
au « grand
jour ».
Parents, cousins et voisins
viennent chez la mariée prendre avec elle
des photos souvenirs et lui présenter les
cadeaux et les bouquets de fleurs. Les femmes
lancent des « you
you » en répétant des
poèmes exprimant bonheur, fertilité
et glorifiant et vantant la famille de la
mariée et ses origines. Arrivent ensuite les
parents du jeune homme accompagnés de sa
grande famille ; la mère
présente à sa belle-fille une parure
en or et en pierres précieuses, les jeunes
filles, sur des plateaux décorés,
distribuent une boisson fraîche, des
bouchées de Baklawa ( sorte de pâtisserie
orientale), des bonbons et du chocolat
décorés . Pendant ce temps, le
marié, devant la porte de l'église,
attend impatiemment avec ses amis et les
invités l'arrivée de sa
bien-aimée.
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A
la sortie de sa maison paternelle, la fille pleure
en baisant la main de son père et en serrant
très fort contre elle sa mère et ses
soeurs.
Après la
cérémonie de couronnement, tout le
monde se réunit sur une place publique pour
les félicitations et les vÏux. Il est
intéressant de raconter que la mariée
doit piétiner les orteils des jeunes filles
encore célibataires dans le but de leur
souhaiter un mariage très prochain. De
même, elle invite toutes les filles à
se réunir derrière elle pour leur
jeter son bouquet de fleurs ; chanceuse est
celle qui le retient ; elle sera enviée
des autres parce qu'elle se mariera la
première.
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Avant de
mettre les pieds dans sa nouvelle maison, la mariée
doit coller au-dessus de la porte d'entrée une
pâte dans laquelle elle enfonce quelques pièces
de monnaie, signe de générosité, de
prospérité et de
bénédiction .
On
égorge des moutons pour festoyer avec tous les
invités, on chante, on danse, on trinque... on se
permet , ce soir - là, ce qui est interdit
d'habitude.
Ivres de
joie, les invités font le « Zaffé » : les mariés sont
portés sur les épaules, les foulards sont
noués autour de la taille des jeunes filles, les
cercles de Dabké sont formés, et, au son du
tambourin, les pétales de fleurs sont
éparpillées sur le nouveau
couple !
Pour
émerveiller la foule, certains jeunes cassent des
pierres dures, se vantant de leur force montagnarde. Plus
loin, un danseur retient l'attention et l'admiration de tous
: il met sur la tête une cruche d'arak et tourne tout autour du couple . Ces
grandes réjouissances demeurent tard dans la nuit et
même jusqu'à l'aube ! Bon mariage.
P.
S
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Chaque 22 novembre, nous célébrons
l'indépendance qui commémore le
départ du dernier soldat étranger de
notre pays en 1943. Ce jour-là, tout le peuple
libanais est concerné : l'état
et les institutions officielles et privées
organisent des cérémonies et des
défilés militaires auxquels toute la
population est invitée à
assister.
A
l'école, la journée est
agréable ! Toutes les classes
descendent dans la grande cour, on se range par
cycles et on défile, tous en tenue de sport,
guidés par des élèves
vêtus d'uniformes militaires. On hisse le
drapeau et on chante l'hymne national. Ensuite, la
directrice prononce un discours : elle salue
l'assistance, rend hommage aux martyrs, au pays et
encourage tous les élèves à
croire toujours à la liberté qu'il
faut retrouver à tout prix...
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L'ambiance devient plus touchante
à l'accueil des enfants du cycle maternel :
ils avancent coiffés de couronnes où
est dessiné le drapeau, ils saluent la foule
des élèves en
chantant : « O Liban ma
patrie ». Puis arrivent les jeunes
collégiens en uniformes militaires ;
ils forment avec leurs corps le cèdre du
Liban ! Oui, ils font de
leurs corps un Cèdre ! On les applaudit
vivement, les uns libèrent des pigeons, les
autres envoient des ballons rouges blancs et verts
haut, très haut dans le ciel, vers
l'infini...
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Puis
se succèdent quelques élèves
sur le podium, où ils récitent des
poèmes chantant la patrie, la liberté
et la souveraineté.
A la
fin, avec les chansons patriotiques de Fayrouz la fête aura
encore un autre charme : responsables et
élèves, on s'exprime
spontanément, main dans la main, on danse le
Dabké libanais, les
têtes levées, les épaules
dressées, les regards fiers, c'est
l'apogée d'une joie inexprimable...
Que Dieu
sauvegarde notre patrie qui n'a pas connu de vrais
moments d'indépendance !
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En feuilletant l'album de photos, je me suis
arrêtée devant une petite fille en
robe blanche dentelée et
festonnée ! Elle était superbe
même en pleurant entre les mains du
curé qui lui versait de l'eau sur les
cheveux !
C'était moi, c'était
mon baptême ! J'ai appelé maman
pour avoir plus de détails. Elle
répondit avec affection : «Tu étais
comme un ange ». C'était un dimanche, le
11 /9/ 1994, à l'église de saint
Georges dans mon village à Daniyé.
Elle m'a raconté ensuite que
j'ai crié quand on m'a
déshabillée et quand on m'a
savonné la tête après le saint
chrême. Et pour faire le tour de
l'église, les participants,
c'est-à-dire ma famille et les voisins
avaient allumé des bougies
décorées et chanté en suivant
le curé et l'enfant baptisé.
À la fin de la
cérémonie, le parrain et la marraine,
avec mes parents, ont reçu les
félicitations ; et tout le monde
s'était dirigé vers la maison
où on avait préparé un
buffet !
Ce
qui a le plus attiré mon attention, c'est le
gâteau ayant la forme de l'Evangile : il
trône sur la table avec plusieurs autres
tartes et friandises. Ces photos m'ont vraiment
évoqué une occasion très
chère, mais, dommage, j'étais
bébé et je n'ai pas vécu
pleinement l'événement. Tout
simplement, je contemple les photos, je cherche
à reconnaître les personnes et je
trouve que ces gens qui m'ont entourée me
sont très très chers.
Joëlle
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