MEXIQUE

Juan Diego CUAUHTLATOATZIN

"AIGLE-QUI-AIME"

 

1531 : le manteau et les roses de Juan Diego

Sur les bancs d'une église romane parmi tant d'autres, on peut trouver, laissé là à l'attention des visiteurs, un joli petit livre illustré de dessins naïfs : c'est le récit le plus ancien des apparitions de la Vierge de Guadalupe. ( L'opuscule a pour titre "Nican Mopohua" et l'église est celle de Notre-Dame de Guadalupe, paroisse des Pères Légionnaires du Christ, une congrégation fondée au Mexique en 1941 par le père Marcial Maciel. )

Cet ouvrage fut écrit par le père Antonio Valeriano, d'origine indienne, né en 1520 et mort en 1605, qui avait en 1545 consigné par écrit les événements prodigieux qu'il avait entendu raconter de vive voix par les témoins de langue "nahuatl". ( La traduction de l'espagnol en italien est de Walter Puccini, auteur de " Le prodigiose rose del Tepeyrac", éd. De Rossi, Tivoli. )


Tableau de Juan Correa de Murcia évoquant la scène durant laquelle Juan Diego montra à son évêque un voile sur lequel s'était miraculeusement imprimée l'image de la Vierge. Ce tableau réalisé au Mexique en 1669 se trouve aujourd'hui dans l'église de San Ildefonso à Rome.

C'était vers la fin de l'année 1531. A Mexico et dans la province de la Nouvelle-Espagne, sous domination espagnole depuis dix ans, la guerre ayant pris fin, l'Evangile avait commencé à être diffusé par les Pères Franciscains qui avaient débarqué dans le pays en 1524.

Le samedi 9 décembre au matin, de très bonne heure, avant l'aube, un indien pauvre et simple, humble et bon, originaire du village de Cuautitlan - situé à seize kilomètres seulement de Mexico - et venant de se convertir à la foi du Christ ( il avait choisi comme nom de baptême Juan mais on le surnommait Diego), se dirigeait du village de Polpetlac, où il demeurait avec son épouse Maria Lucia, une indienne, vers le temple de Saint Jacques Majeur - Saint patron de l'Espagne - où se tenait la paroisse des Pères Franciscains, dans le quartier de Tlaltelolco. Il venait y écouter la Sainte Messe célébrée en l'honneur de la Vierge.

Arrivé à l'aube au pied de la petite colline de Tepeyac, qui s'élève au-dessus de la plaine, près du lac de Texcoco, l'indien entendit un doux chant mélodieux qui semblait provenir d'un vol d'oiseaux dont le singulier concert était répercuté par la haute crête.

Levant les yeux vers le lieu d'où provenait la douce musique, il vit un nuage blanc lumineux, entouré d'un arc-en-ciel produit par la vive lumière qui émanait de son centre.

Juan Diego resta ébahi, plongé dans un doux ravissement, n'éprouvant aucune crainte ni aucun trouble mais sentant au fond de son coeur une joie profonde et inexplicable qui le fit s'exclamer : " Qu'est-ce que j'entends et que je vois ? Où est-ce qu'on m'emmène ? J'ai peut-être été transporté au Paradis terrestre, au lieu originel du genre humain ? "

Alors qu'il était encore plongé dans l'extase, le chant cessa et Juan Diego s'entendit appeler par son nom. C'était une voix de femme, douce et délicate, qui venait du coeur du nuage et l'invitait à s'approcher.

Humblement, l'indien monta la colline en courant - il était alors quatre heures du matin - et il s'approcha du nuage lumineux :

 

il vit au centre de cette splendeur une très belle Dame dont les vêtements étaient si lumineux que, frappées par la lumière, les roches dépouillées alentour chatoyaient de mille feux comme des pierres précieuses et les feuilles des quelques rares plantes d'aubépine, qui avaient beaucoup de mal à pousser à cet endroit, ressemblaient à des émeraudes, tandis que que leurs troncs, leurs rameaux et leurs épines brillaient comme de l'or.

La belle Dame au visage doux et aimable s'adressa à lui dans la langue du Mexique : " Juan Diego, mon fils que j'aime tendrement comme un enfant, où vas-tu ?"

L'indien répondit : " Je vais, Ô ma douce Patronne, à Mexico, dans le quartier de Tlaltelolco, pour entendre la Sainte Messe célébrée par les ministres de Dieu." Sur cette réponse, la douce Dame ajouta :

"Sache, mon fils bien-aimé, que je suis la Vierge Marie, Mère du Dieu véritable, Auteur de la Vie, Créateur de l'Univers et Seigneur du Ciel et de la Terre, omniprésent ; je souhaite que tu fasses édifier un temple en ce lieu à partir duquel, pleine de compassion à ton égard et à l'égard de tes semblables, je montrerai, telle une Mère, ma douce clémence aux indigènes, et à ceux qui m'aiment et me cherchent. Là j'écouterai les suppliques et les plaintes de tous ceux qui demanderont ma protection et m'invoqueront dans leurs tourments et dans leurs peines ; là je les consolerai et les assisterai. Pour que s'accomplisse ma volonté, tu te rendras à Mexico, au palais épiscopal, et tu diras à l'évêque que c'est moi qui t'envoie et qui souhaite qu'il fasse ériger un temple en ce lieu.

Tu lui raconteras ce que tu as vu et entendu et sois certain que je te serai reconnaissante pour tout ce que tu feras pour moi à l'occasion de cette mission que je t'ai confiée, et que je parlerai de toi. Maintenant que tu sais ce que je souhaite, va en paix, mon fils, et souviens-toi que je récompenserai tes efforts et ta diligence ; fais tout ce qu'il est en ton pouvoir de faire."

Juan Diego se prosterna à terre et répondit : " Je vais faire exécuter vos ordres, Ô très noble Dame, comme un humble serviteur. Soyez tranquille."

Il fallut cependant quatre visites supplémentaires de Marie et plusieurs miracles de sa part pour convaincre l'évêque de l'authenticité de l'apparition. A six heures du matin, le 12 décembre 1531, la Vierge descendit du mont Tepeyac, toujours entourée d'un nuage blanc, et elle se présenta à l'indien qui, troublé et affligé, était à la recherche d'un prêtre pour son oncle gravement malade. Elle le réconforta en lui disant que son parent était guéri.

Rassuré et content, l'indien répondit : " Alors, belle Dame, envoyez-moi chez l'évêque et donnez-moi le signe dont vous m'avez parlé, afin qu'il me croie."La Sainte-Vierge lui dit : " Mon très cher fils, monte jusqu'au sommet de la colline sur laquelle tu m'as vue et où tu m'as parlé, cueille les roses que tu y trouveras, mets-les dans ton manteau, puis apporte-les moi. Je te dirai alors ce que tu dois faire et dire".

L'indien obéit sans mot dire, bien que sachant avec certitude qu'il n'y avait pas de fleurs en ce lieu : ce ne sont là en effet que roches escarpées sur lesquelles aucune fleur ne saurait pousser. Arrivé en haut de la colline, il trouva un jardin de roses de Castille, fraîches et délicatement parfumées, couvertes de rosée.

Il déposa son manteau à terre, cueillit autant de fleurs qu'il pouvait en contenir et les apporta ensuite à la Vierge Marie qui attendait au pied d'un arbre que les indiens appellent "cuauzahualt".

Humblement, l'indien montra à la Vierge les roses qu'il avait cueillies : celle-ci les prit et les mit dans le manteau ( poncho ), puis elle dit :

"Voici le signe que tu dois apporter à l'évêque. . Tu lui diras qu'après avoir eu cette preuve, il doit faire ce que je lui ai demandé. Fais attention, mon fils, à ce que je te dis et souviens-toi que je place ma confiance en toi. En chemin, ne montre à personne ce que tu portes et n'ouvre ton manteau qu'en présence de l' évêque. Raconte-lui alors ce que je t'ai ordonné de faire ; ce sera là la preuve qui lui donnera le courage de faire élever mon temple."

Sur ces mots, la Vierge disparut. L'indien fut très content d'avoir reçu le signe, car il comprenait que le message allait finalement être perçu.

Il portait les roses avec grand soin, les regardant de temps en temps et en appréciant la beauté et le parfum.

Parvenu à l'évêché avec son message, Juan Diego demanda à plusieurs domestiques d'avertir l'évêque de sa présence, mais il ne fut pas entendu tout de suite.

...

Les domestiques avaient remarqué qu'il portait quelque chose dans son manteau et ils tentèrent de voir ce dont il s'agissait. Malgré la résistance qu'il opposa, ils réussirent à découvrir légèrement le précieux paquet et à voir les roses qu'il contenait.

Elles étaient si belles qu'ils essayèrent d'en prendre quelques unes, sans y réussir. Elles semblaient peintes ou tissées dans le manteau. Les serviteurs coururent raconter ce qu'ils avaient vu à l'évêque.

 

Introduit auprès du prélat, Juan Diego rapporta le message et dit qu'il apportait le signe demandé à la Vierge, dont il était le messager. Il ouvrit le manteau et les roses tombèrent sur le sol ; sur le tissu grossier du poncho, à la place des fleurs, on vit alors se dessiner l'image de la Très Sainte Vierge, que l'on peut encore admirer de nos jours.

Il était onze heures, ce 12 décembre 1531.

 


Extrait de l'ouvrage Pourquoi la Vierge apparaît aujourd'hui,

de Anna-Maria Turi, Editions du Félin, Paris 1988, 450 pages, p. 57 à 60.

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