Dans une petite église copte du Caire...

Photos Y. Clady © Le Caire 2000


Séquence indissociable de la mémoire du peuple égyptien dans toutes ses composantes, l'histoire des coptes s'enracine dans les époques les plus reculées de l'Egypte. De toutes les communautés chrétiennes d'Orient, les coptes semblent le plus fermement ancrés dans la terre et l'histoire...

Un recensement conduit en1986 donnait 2 829 349 chrétiens, soit 5,9 % de la population égyptienne. Actualisé en 1995, cela représenterait un effectif de 3,3 millions. Les autorités coptes et certains intellectuels coptes ou musulmans considèrent que ce chiffre sous-estime largement une communauté qui pourrait compter en réalité 6 à 12 millions de personnes, sur un total de 60 millions, soit 10 à 20 % des Egyptiens...

Informations puisées dans le magazine QANTARA n° 35, printemps 2000, p. 32



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COPTE
, adj. et n. ( Cofte, 1665 ; du grec aiguptos, "égyptien" ). 1° N. Chrétien d'Egypte. 2° Adj. Qui se rapporte aux Coptes. Langue copte, et subst. Le copte ( langue liturgique ). V. Egyptien, 1°. "Le copte, l'idiome de transition qui s'est parlé en Egypte depuis l'introduction du christianisme, qui est éteint maintenant" ( Champollion ) .

Champollion a traduit les hiéroglyphes en s'aidant des similitudes entre le copte et l'égyptien pharaonique (1821-1824)

Dictionnaire Petit Robert, éd. de 1983

Le christianisme apparaît très tôt en Egypte, vers 40 après J.C., en pleine période romaine. Durant la seconde moitié du IVè siècle, l'apparition des premiers monastères marque la naissance d'un art nouveau, dit copte ( de l'arabe qibt, qui désigne les chrétiens d'Egypte de souche autochtone ). Cet art mélange l'imagerie païenne et le message biblique. La langue copte est née vers la seconde moitié du IIIè siècle de problèmes liés à la traduction des Ecritures. En fait, cette langue n'est autre que l'égyptien ancien, mais retranscrit phonétiquement à l'aide de l'alphabet grec enrichi de quatre caractères empruntés au démotique ( ultime évolution de la vieille écriture des pharaons, devenue trop complexe pour être vraiment accessible...)

...d'après Les coptes, ou l'art du mélange, article de Marc Bastian, in Dernières Nouvelles d'Alsace du Samedi 5 août 2000.
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Egypte chrétienne ou Egypte copte ?

Il n'y a pas de différence entre les deux si ce n'est que le mot copte désigna au début tout égyptien non arabe et ne prit qu'ensuite un sens spécifiquement et strictement religieux pour désigner les égyptiens chrétiens. ( ...) Cette Egypte des premiers chrétiens est considérée comme la plus ancienne de toutes les Eglises chrétiennes orientales. C'est l'Egypte des sables, des monastères de la vallée du Nil, des ermitages dans le désert et des premiers saints fondateurs : Antoine, Pacôme, Marcaire, Amoun, Shénouti et bien d'autres encore. Cette Egypte chrétienne, magnifiée par les Pères de l'Eglise et les visiteurs du désert dès le IVè siècle, se sépara très tôt de celle de Byzance pour devenir un patriarcat autonome, ou, comme le nomment les grecs, autocéphale, autrement dit "ayant son propre chef".

D'après l'écrivain Jacques Lacarrière, cité dans le Magazine des cultures arabe et méditerranéenne QANTARA n° 35, printemps 2000, p. 55

 


"L'Eglise d'Alexandrie, évangélisée par saint Marc au premier siècle, était l'une des cinq Eglises-mères de la chrétienté (Jérusalem, Alexandrie, Rome, Byzance et Antioche) ; en 451, au concile de Chalcédoine, Alexandrie, suivie par les Eglises d'Antioche et d'Orient, refusa la proposition de la primauté romaine et la formule qui divisait le Christ en deux natures après l'union réalisée dans l'Incarnation."

La théologie copte s'inspire fortement des Pères de l'Eglise.

"L'Egypte, qui avait connu sous les dynasties pharaoniques une pensée théologique très développée, est devenue, au IVè siècle après J.C., à Alexandrie, la matrice de la théologie chrétienne ; c'est le temps des Pères de l'Eglise, Origène, Athanase, Cyrille et bien d'autres, véritables phares du christianisme que l'Eglise d'Egypte est fière d'avoir donnés au monde."

...d'après Ashraf et Bernadette SADEK, éditeurs du Monde copte, in Qantara, n° 35, printemps 2000 ... La spiritualité copte, p. 49-50
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Alors qu'au fil des siècles les images du crucifié se multiplient dans l'ensemble du monde chrétien, oriental et occidental, les coptes respecteront longtemps la tradition paléochrétienne qui évoque la Passion du Christ sans la montrer. C'est qu'ils ne veulent évoquer le supplice et la mort du Christ que pour mieux célébrer sa Résurrection : en ce sens, la croix est un nouvel Arbre de vie au fruit incorruptible... La Passion est supplantée par la joie de la Résurrection. La mort est écrasée par le Christ et le bonheur offert à tous ses fidèles...

A partir du XVIIè siècle, les crucifixions inspirées des modèles post-byzantins se multiplient. Mais la croix triomphale et nue garde sa suprématie, dans toutes les manifestations de l'art copte...

L'ancien outil de supplice, promu Arbre de vie, est glorifié comme un signe cosmique qui réunifie et régénère la création.

"Salut à la Croix qui a rendu douces les eaux amères" (liturgie copte).

...d'après un article de Mahmoud Zibawi, historien de l'art, La croix dans l'art copte : hiéroglyphe, signe et icône in QANTARA n° 35, printemps 2000, pages 51-52

 

 

 

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LE CULTE DES RELIQUES


Au Moyen-age, en Europe, le culte des reliques assure renommée et prospérité aux sanctuaires qui en possèdent. Vers elles affluent pèlerins et dons. Objets de vénération, les vestiges des "saints" sont exposés sous forme de corps entiers, de membres ( pied, main, doigt ), ou de fragments de squelettes. Chez les Coptes d' Egypte, le culte des reliques reste vivace, dans chaque église, chaque monastère...
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Nous vénérons les reliques des saints et nous implorons l'intercession des anges et des saints, ceux qui vivent et ceux qui sont morts. Ils constituent une phalange de témoins dans l'Église. Eux et nous attendons dans l'espérance la seconde venue de notre Seigneur lorsque sa gloire se révélera pour juger les vivants et les morts."

DÉCLARATION COMMUNE DU PAPE PAUL VI ET DU PATRIARCHE CHENOUDA III 

Du Vatican, 10 mai 1973
En Afrique, dès le IVè s., les reliques des martyrs sont l'objet d'un culte privé (on les porte sur soi, dans des boîtes de fer).

 


Décorations sculptées

Après la conquête arabe ( 639 ), les charpentes des églises coptes sont remplacées par de hautes coupoles et le choeur ou khurus forme une pièce transversale indépendante, séparée de la nef par des portes et des écrans en bois ornés de somptueuses compositions géométriques ou d'arabesques, parfois incrustés d'ivoire, dans le goût de l'art islamique ( églises du Caire, monastères de la mer Rouge...)

...d'après un article de Marie-Hélène RUTSCHOWSCAYA, conservateur en chef, section Copte, au Musée du Louvre, Aspects de l'art copte, in Qantara n° 35, printemps 2000, p. 53-54 .

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L'image de la croix

Souvenir de l'ère pharaonique, la croix ansée survit : l'hiéroglyphe signifiant "la vie" - ankh - devient le signe du "bois immortel qui donne la vie"...

"La similitude du hiéroglyphe pharaonique, antique signe de vie, et du sceau chrétien n'a rien de gratuit. La tradition attribue à cette identification un caractère prophétique. La croix des gentils annonce la croix du Christ et invite le païen à la conversion et l'entrée dans la vie."

Sur d'imposants panneaux de bois nacrés, voire incrustés d'ivoire, les formes de la croix s'insèrent dans des masses géométriques savamment architecturées...

Dans l'art copte, au fil des siècles, l'image de la croix se multiplie et acquiert diverses formes. Elle fleurit au milieu des tressages de roseaux et de palmes et s'imbrique dans des réseaux de cercles et de losanges.

...d'après un article de Mahmoud Zibawi, historien de l'art, La croix dans l'art copte : hiéroglyphe, signe et icône in QANTARA n° 35, printemps 2000, pages 51-52

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Du symbole au geste

Dans le rituel copte, les symboles sont réellement vécus, jamais "suggérés" : les aspersions d'eau, signes de purification et de vie, sont de véritables aspersions, si bien que les fidèles reçoivent assez d'eau pour s'en passer sur le visage et les bras ; le baptême est une véritable immersion, visage compris.

La vénération des icônes s'accompagne de gestes : on veut toucher, voir, embrasser, on confie des intentions écrites sur des morceaux de papier placés derrière l'icône...

...d'après Ashraf et Bernadette SADEK, éditeurs du Monde copte, in Qantara, n° 35, printemps 2000

La spiritualité copte, p. 49-50

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Au Concile d'Ephèse ( 431 ), l'Eglise d'Egypte imposa sa façon de vénérer la Vierge Marie. Mais au Concile de Chacédoine ( 451 ), elle choisit le parti opposé à Rome et à Constantinople sur la question de la double nature (humaine et divine) de Jésus.* Elle devint une Eglise "séparée", schismatique - et persécutée, dans un Empire byzantin dont le souverain se voulait le défenseur sourcilleux de la foi correcte.

...d'après Christian Cannuyer, Des Egyptiens parmi les Egyptiens in Qantara n° 35, printemps 2000, p. 40

* Le monophysisme

Au Concile d'Ephèse ( 431 ), les monophysites, soucieux de concilier la nature humaine et la nature divine du Christ, soutiennent qu'il y a dans le Christ une nature ( physis ) unique ( monos )... Il suffit d'une formule poétique pour embraser les esprits : des monophysites commencèrent à prétendre que la nature divine du Christ avait absorbé sa nature humaine comme une goutte de miel se dilue dans la mer... Au Concile de Chacédoine, l'Eglise d'Egypte s'aligne sur la position des monophysites en s'opposant à ceux qui, de Rome à Constantinople, prônent la double nature ( humaine et divine ) de Jésus.

"Une Force mystérieuse"

...J'arrivai jusqu'à la porte de l'église, mais, quand je voulus y entrer, ainsi que le faisaient les autres sans la moindre difficulté, j'en fus empêchée par une Force mystérieuse qui me repoussa au dehors. Et je me retrouvai toute seule sur la place devant l'église. Pensant que cela était peut-être dû à la faiblesse, je me jetai au milieu de nouveaux arrivants pour entrer avec eux, mais en vain : dès que j'atteignais le seuil, la Force mystérieuse me repoussait alors que tous les autres entraient sans peine. Et je me retrouvai une fois de plus rejetée de l'église.

Je m'y repris à trois ou quatre fois, toujours en vain. Désespérée, exténuée, car mon corps était tout meurtri à force d'avoir été bousculé par la foule, je me retirai dans un coin de la place et je me mis à réfléchir sur la cause qui m'empêchait de voir le saint Bois où un dieu était mort pour donner la vie aux humains. Il me vint alors une pensée salutaire..."

Extrait de la Vie de Marie l'Egyptienne, récit figurant dans le recueil Vie des Saints Pères du désert, traduit par Arnaud d'Andilly ( 1654 ).

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Une cérémonie animée

"Le bruit des conversations, les interpellations, le tapage des enfants, les éclats de voix des mamans, les cantiques des jeunes gens à la gloire de la Vierge Marie se répercutent, mêlés harmonieusement, dans une allégresse qui se propage à tous les échos. Aujourd'hui, c'est la fête de l'Assomption, de l'Ascension du corps pur de Marie dans le ciel, tel que l'apôtre Thomas l'a vu, aux Indes."

Edouard Al-Kharrat, Le mouled* de la Vierge, in Qantara n° 35, printemps 2000, p. 47

*mouled : anniversaire du Prophète ou des saints


"C'est surtout au
culte de la Sainte Vierge que se trouve particulièrement lié le culte de l'Archange Gabriel. Dès que l'Eglise entonne les louanges de la Reine du Ciel, Gabriel apparaît. Il vient prêter ses paroles, inspirer les chants, attiser les saintes ardeurs, animer la foi et la confiance dans les âmes. La prière de la terre, si la prière de ce prince du Ciel ne l'accompagnait pas, résonnerait moins agréablement à l'oreille de la Reine des Anges et des hommes. Qu'elle est touchante cette modeste supplication de l'Eglise conjurant Marie de recevoir le salut que ses enfants lui adressent comme des lèvres de Gabriel lui-même : "Sumens illud ave - Gabriel ore !"

Père E. Baffie, L'Archange saint Gabriel, in L'Immaculée et Saint Gabriel, 1999, © Editions Bénédictines, Rue E. Guinnepain - 36170 Saint-Benoît-du-Sault - France.

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"Malgré les persécutions, l'Eglise d'Egypte transmet une spiritualité exempte d'amertume. Tous ceux qui ont pu assister à une cérémonie copte ou pénétrer dans un monastère égyptien auront découvert là des sanctuaires de joie et de paix : les liturgies, longues et somptueuses mais aussi extrêmement animées, vivantes, populaires, rassemblent enfants, vieillards, pauvres et riches dans une même contemplation de la splendeur divine qui se livre à tous les fidèles dans un débordement d'amour et de miséricorde..."

Ashraf et Bernadette SADEK, éditeurs du Monde copte

in Qantara, n° 35, printemps 2000

La spiritualité copte, p. 49-50

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Photos Y. Clady © Le Caire 2000

AUTRES IMAGES COPTES

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